L’histoire de la Ferme des Etournelles est très ancienne et nous fait voyager à travers les siècles. Sous la maison actuelle se trouvent les traces d’un castellum romain édifié pour défendre les marais tout proches traversés par la Brèche, petite rivière qui se jete dans l’Oise. Pour franchir ces marais au moment de la campagne contre les Bellovaques (51 av.J.-C.) l’armée romaine construit d’immenses ponts de fascines aujourd’hui enfouis dans la prairie
Les fouilles de 1936 suivies de l’inscription du site à l’Inventaire des Monuments Historiques par arrêté du 26 février 1936 témoignent de l’importance de l’ouvrage : 2 ponts, longs de 800 mètres environ, parallèles , à 111 m l’un de l’autre (75 pas romains) composés de 3 sections aux largeurs différentes : 3m90, 9 m et 18 m. 60 cm de hauteur. Les fouilles conduites par l’archéologue Georges Matherat ont permis d’évaluer que les légions romaines ont utilisé pour leur construction 2000 stères de bois de grume, 4000 m3 de fagots et des dizaines de milliers de piquets.
Un cinéma à Beauvais, des noms de rue, une maquette au Musée de la Civilisation romaine à Rome rappellent cette dernière grande bataille de la Guerre des Gaules. De nouvelles fouilles permettraient une datation certaine des bois enfouis dans la tourbe. Ceux déposés par Georges Matherat au Musée de Saint-Germain en Laye à une époque troublée ont disparu.
Au Moyen-Age, le castellum romain est devenu un manoir défensif. Sous la Jacquerie (révolte paysanne en 1358) il est ravagé par les Jacques et démoli par ordres de Charles VII. Il n’en garde pas moins son assiette initiale et des douves qui étaient visibles jusqu’à la fin du 19ème.
En 1453 le manoir appartient à Karados de Quesnes. Au 17ème il passe entre les mains du seigneur d’Autreville, grand-père du cardinal de Richelieu. Puis par un acte de vente du marquisat de Nointel daté du 31 août 1671, conservé au Musée Condé de Chantilly, Louis Béchameil conseiller du roi Louis XIV achète de nombreuses terres dont le domaine des Tourelles. Il fait construire un bel ensemble de bâtiments constitué de la façade occidentale du logis principal, de la cour de ferme et de la grange à récolte. En 1781 le fief des Tourelles est devenu une vaste ferme exploitée par Antoine Boucher, ancêtre des propriétaires actuels. Le prince de Condé acquiert le domaine en 1787. Lorsqu’il émigre lors de la Révolution française, le domaine vendu en bien national est acheté le 1er thermidor an II (19 juillet 1794) par deux cultivateurs des villages voisins. Un an plus tard, Antoine Boucher (1795) devient propriétaire des terres qu’il cultivait. Depuis le domaine est resté sans interruption dans la même famille. Au début du 19ème c’est une exploitation agricole aux activités multiples. La culture des céréales est complétée par l’élevage de nombreux animaux : plus de 120 moutons, 8 vaches, 5 chevaux, des porcs et de nombreux volatiles, un potager nourricier et un verger.
Carte d’état major de 1818 représentant la Ferme des Etournelles
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En 1848, à l’occasion du mariage d’Augustine Boucher avec Eugène Leclerc, la maison et le parc sont transformés
L’aménagement d’un parc romantique autour d’un étang et d’un nouveau potager protégé par de hauts murs est confié à un paysagiste du Val d’Oise, Louis Sulpice Varé qui se faisait connaître pour la réalisation de parcs privés en Ile de France et à qui Napoléon III confiera en 1852 l’aménagement du Bois de Boulogne.
En août 1916 l’escadrille des Cigognes s’installe à Breuil le Sec et habite les Etournelles. Une photo montre les avions allemands remorqués sur la pelouse. Les pilotes sont accueillis par Antoinette Ariès, fille du Colonel Martin Decaen, toute jeune infirmière militaire à Senlis (Croix de guerre 1914-1918). Elle hérite des Etournelles à vingt ans à la mort de son arrière-grand-mère le 9 février 1915. Il n’y a alors ni électricité ni eau courante.
A la Deuxième Guerre mondiale, les Allemands occupent la maison à partir du 9 juin 1940. Les régiments se succèdent jusqu’au 3 septembre 1942. En 1944 les OT (Génie civil) y installent un centre de ravitaillement. Le salon devient boucherie, la bibliothèque, boulangerie, l’ancienne cuisine, crèmerie, épicerie… A leur départ, dans la maison tout est à refaire. Pendant toute cette période le potager a continué son rôle de jardin nourricier avec la production de fruits et légumes.
En 1972 Marie José et Robert Le Normand se lancent dans un grand programme de rénovation et de valorisation du jardin. La grange est inscrite par arrêté à l’Inventaire des Monuments Historiques le 23 septembre 1988, le potager suit le 27 décembre 2004. Grâce à leur dynamisme les visiteurs découvrent avec enchantement le jardin des Etournelles depuis 1992.